Les rapports sur les risques du FEM et d’AGCS vont éclairer les perspectives 2019. Il est sans doute bon de faire le bilan de 2018 pour préparer cette nouvelle année. StrategicRISK a listé pour vous les dix plus grands risques et leurs enseignements

PIRE RISQUE ÉMERGENT : L’ITALIE

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Les banques italiennes sont instables depuis des années. En 2017, l’Europe a autorisé une recapitalisation d’état de 5,4 Md€ pour la Monte dei Paschi di Siena, la plus ancienne banque du monde, soit un plan de sauvetage cumulé de plus de 20 Md€. En 2018, les choses ont empiré : le nouveau gouvernement italien a déclaré la guerre à la réglementation fiscale communautaire. On aboutit ainsi à une impasse qui menace tout le secteur bancaire transalpin. 

Les règles communautaires stipulent que l’Italie ne peut pas emprunter plus de 3 % de son PIB. Mais l’Italie doit moderniser ses infrastructures — l’effondrement du pont de Gênes est significatif du délabrement des hôpitaux, écoles, ponts et routes.

La nouvelle coalition compte défier l’Union. En dépit des avertissements et des menaces d’amende de la Commission européenne, Luigi Di Maio affirme : « nous ne reculerons pas d’un millimètre. » Pendant ce temps, les Italiens fortunés placent leur argent en France et en Suisse.

Le scénario le plus noir ? Une fuite des capitaux, des taux de crédit qui flambent et un effondrement financier.

L’ITALIE EST UNE POUDRIÈRE QUI POURRAIT EXPLOSER EN 2019.

LA PIRE « CAT NAT » : L’OURAGAN MICHAEL

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L’ouragan Michael qui s’est abattu sur le nord-ouest de la Floride en octobre était le troisième plus violent de l’histoire américaine. Les vents à plus de 250 km/h, les plus intenses que l’état ait connus, étaient juste en dessous du passage en catégorie 5.

Michael a évidemment causé des dégâts énormes dans cette région. Il a renversé des avions de chasse sur la base aérienne de Tyndall et endommagé les installations. Le coût ? Six milliards de dollars. Les débris de l’ouragan ont même atterri à Tallahassee, à 130 kilomètres de là.

Avant la Floride, Michael avait fait un détour par l’Amérique Centrale, endommageant mille habitations au Honduras, et privant 20 000 personnes d’électricité à Cuba. Au total, le bilan s’élève à 60 décès et à 11,3 Md$ de dégâts.

La question pour les risk managers est donc de savoir si la fréquence de ces catastrophes naturelles augmente. La réponse est : très certainement. On a dénombré 16 cyclones hors normes durant les 25 dernières années. En 2017, on a compté 40 cyclones « à intensification rapide », capables de passer de la catégorie 1 à 5 en moins de 24 h. C’est ce qui explique en partie les 90 Md$ de dégâts générés par l’ouragan Maria de 2017.

Le coût cumulé des catastrophes climatiques pour 2017 aux USA est de 306,2 Md$, soit 50 % de plus que 2005, l’année record précédente : la tendance est bien nette.

LA FRÉQUENCE DES OURAGANS DE CATÉGORIE 4 ET 5 AUGMENTE

LA PIRE FAILLITE : CARILLION (R-U)

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Le rôle du risk manager consiste, entre autres, à évaluer la stabilité des contreparties. Si un partenaire coule, les résultats peuvent être désastreux : impayés, rupture de la chaîne logistique, dommage de réputation…

La faillite de Carillion, le géant britannique du BTP, en 2018, constitue un exemple frappant.

Carillion est un cas d’école sur au moins trois plans. D’abord, faire attention aux marges. Carillion travaillait avec des marges de 1,6 % seulement : le moindre dérapage d’un projet pouvait anéantir sa rentabilité. Une perte de marge de 845 M£ sur quatre contrats a sonné le glas pour l’entreprise.

Rupert Soames, le petit-fils de Winston Churchill, dirige Serco, un concurrent de Carillion. Une brosse pour toilette trône sur son bureau : elle est censée lui rappeler de ne jamais travailler pour moins de 5 %, la marge minimale pratiquée par les entreprises de nettoiement. Une règle négligée par Carillion, prêt à tout pour gagner de nouveaux contrats.

Ensuite, faire attention aux impondérables. Un projet de rocade à Aberdeen est retardé par l’opposition du public, les intempéries et les interventions politiques. Les coûts dérapent, Carillion perd énormément d’argent. Les risk managers ont tout simplement oublié de tenir compte de ces risques potentiels.

Enfin, l’illusion de la taille : Carillion était perçue comme une entreprise trop grande pour disparaître. Tragique erreur ! Quelque 30 000 PME, qui ont perdu près de 2 milliards de livres dans l’affaire, l’ont appris à leurs dépens.

MARGES RÉDUITES : DANGER À L’HORIZON

LE PIRE RISQUE CYBER : LE RANSOMWARE

Les rançongiciels sont le grand risque en ligne émergent. GrandCrab a récemment extorqué des sommes colossales.

« Quand on sait que le niveau de rançon minimum se situe autour de 600 dollars et que près de la moitié des victimes cèdent au chantage, les créateurs de ransomware ont dû récolter environ 300 M$ au cours des deux derniers mois », annonce Liviu Arsene, un analyste senior chez BitDefender.

Payer la rançon ne garantit d’ailleurs pas que l’on récupérera ses données. Une étude de CyberEdge indique que le quart des personnes ayant acquitté la rançon ne récupèrent jamais leurs données. Par contre, 87 % de ceux qui ont refusé de jouer le jeu parviennent en fin de compte à rétablir leurs systèmes. Les sommes en jeu font penser que le problème va empirer.

77 % des réseaux ont connu un incident de sécurité en 2018

55 % des entreprises ont été touchées par un ransomware en 2018

En moyenne, 12 % du budget informatique des entreprises est affecté à la sécurité

SAUVEGARDER SES DONNÉES EST LA SEULE PARADE EFFICACE CONTRE LE RANSOMWARE

PIRE ÉVÉNEMENT POLITIQUE : LE BREXIT

Brexit

David Folkerts-Landau est économiste en chef à la Deutsche Bank. Il est convaincu que « le Royaume-Uni pourra tirer son épingle du jeu voire dépasser l’Europe » après le Brexit. Sur le long terme, certains avis sont même assez optimistes. À court terme, cependant, le Brexit va infliger des pertes à l’économie britannique, en particulier dans le secteur financier.

On a pour l’instant constaté peu de pertes d’emploi. En juillet 2018, d’après la City, seuls quelque 1 600 postes avaient émigré. La Présidente de la City of London Corporation estime cependant que les pertes d’emploi pourraient atteindre les 12 000.

Il ne s’agit pourtant pas là du décompte final. La migration des compétences vers Dublin, le Luxembourg ou Francfort pourrait donner naissance à des infrastructures concurrentes — là où il n’en existait aucune auparavant. Les relations futures vont reposer sur des accords mutuels ou des arbitrages en cas de litige. Les 70 milliards de livres de recettes fiscales et les 58 milliards d’excédent commercial générés par le secteur financier sont en jeu.

La Société Générale enjoint son staff à se rapatrier en France dans le cadre de leur progression de carrière. Est-ce l’annonce d’une nouvelle guerre froide ?

LE RISQUE POLITIQUE PEUT ÊTRE LE PLUS DANGEREUX

LA PIRE VIOLATION DES DONNÉES : Aadhaar EN INDE

Data breach

Mathew Ettelaie travaille pour le service de cyberprotection de KPMG, qui a reçu le Prix du Pentester (test d’intrusion) de l’année. Quand on lui demande le pourcentage d’entreprises qu’il serait en mesure de hacker, il répond : « 100 % ».

Facebook a admis que les données personnelles de 87 millions d’utilisateurs ont été « partagées de manière inappropriée » avec Cambridge Analytica, une infraction à la promesse faite à la Commission fédérale américaine du commerce de ne jamais révéler ces informations sans l’accord des utilisateurs.

L’appli sportive Strava a pour sa part diffusé des données anonymisées à des fins d’infographie. Problème : il était possible d’identifier facilement certains militaires basés en Syrie ou en Afghanistan.

Néanmoins, la pire des violations des données de 2018 revient sans conteste au grand programme biométrique Aadhaar, réputé inviolable, et qui couvre 99,9 % de la population indienne. Une simple recherche sur Google permettait en effet de découvrir le nom, la parentèle, l’immatriculation fiscale, les numéros de téléphone, la religion et les coordonnées bancaires des utilisateurs…

PERSONNE N’EST JAMAIS À l’ABRI D’UNE VIOLATION DE DONNÉES

LA PIRE DISRUPTION CRÉATIVE : TESLA

Creative Disruption

Lorsque Nokia a fait faillite, la Finlande a connu trois années de récession. L’Allemagne risque-t-elle de connaître le même sort ? Au second trimestre 2018, Tesla Motors a vendu plus de véhicules que Mercedes-Benz aux USA. Mieux encore, la Tesla Model 3 s’est plus vendue que les autres berlines de luxe de tous les autres constructeurs confondus. Même Andrew Left, le gourou des investisseurs, qui détestait Tesla, a fini par acheter des actions et a déclaré : « Tesla est en train de massacrer ses concurrents. »

Pour l’Allemagne, le défi est énorme : l’automobile représente un cinquième de son industrie et 78 % de la production part à l’export. Un tiers de la R&D est consacré à ce secteur.

Tesla semble avoir tous les atouts en main : le leadership dans les véhicules sans conducteur, l’accès aux ressources en cobalt pour ses batteries, une marque exempte de tout reproche, aucun poids mort du passé à gérer et des voitures sûres. Une note de la banque Berenberg indique que les investisseurs ont mal apprécié la situation financière, les marges et les systèmes de batterie du constructeur américain.

Apprenant le lancement de Netflix, Jeffrey Bewkes, le directeur général de Time Warner, s’était exclamé : « C’est comme de dire que l’armée albanaise va conquérir le monde ». On sait ce qu’il est advenu !

L’INDUSTRIE ALLEMANDE VA DEVOIR SE MESURER AUX INSURGÉS

PIRE RISQUE ÉCONOMIQUE : UNE GUERRE COMMERCIALE AMÉRICAINE

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« Je dirais que les politiques adoptées par l’administration américaine en matière d’échanges représentent aujourd’hui la pire menace sur l’économie mondiale » : tels sont les propos de Philipp Hildebrand, le Vice-président de BlackRock, la plus grande société d’investissement du monde et également ancien président de la Banque Nationale suisse. Il évoque les taxes douanières imposées par Donald Trump sur quelque 250 Md$ de produits chinois comme un risque bien tangible : « Certains pays sont très exposés. »

Si la Chine fait partie des nations les plus exposées, le Canada et l’UE ont passé le plus clair de 2018 à batailler contre ces taxes arbitraires. En janvier 2018, Trump a institué des droits de douane de 30 à 50 % sur les panneaux solaires et les machines à laver, rapidement suivies par des taxes sur l’acier et l’aluminium.

Les risk managers doivent se préparer à des scénarios de guerre douanière, avec des perturbations sur les marchés export et les chaînes logistiques. En rebond, les acteurs affectés pourraient chercher à rattraper leurs pertes.

Jack Ma, le créateur d’Alibaba et plus grande fortune de Chine, décrit cette guerre douanière comme « la chose la plus stupide au monde » et pense que ce sont les USA qui ont le plus à perdre. Aucune solution n’est en vue.

LES GUERRES COMMERCIALES REPRENNENT

LA PIRE CRISE DES MATIÈRES PREMIÈRES : LES TROIS C

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Une pénurie des matières premières peut déclencher une onde de choc sur les chaînes logistiques. Les matières à surveiller ? Cuivre, cobalt et charbon. En 2018, les cours du cuivre ont explosé suite à une grève à Escondida (Chili), la plus grande mine de la planète, et à une demande accrue. D’autres mouvements sociaux au Chili, qui produit 27 % du cuivre mondial, constituent un risque durable.

Les pénuries de charbon affectent pour leur part l’Inde. Les provinces du nord en dépendent pour leur production électrique. Les pénuries créent des coupures d’alimentation et perturbent les entreprises. L’association des producteurs d’aluminium indiens demande au gouvernement de tout faire pour assurer leur alimentation électrique et éviter le chaos.

Le cobalt, lui, est un composant essentiel pour la fabrication des batteries pour véhicules électriques. Un forum rattaché à la bourse des métaux de Londres indique qu’il y aura un déficit de production durant les trois prochaines années. La production redémarre, notamment en RDC, ce qui a provoqué un fléchissement des cours, mais l’avenir reste incertain.

LA VOLATILITÉ DES MATIÈRES PREMIÈRES SERA UN DÉFI POUR LES CHAÎNES LOGISTIQUES.

LE PIRE RISQUE POUR LA SANTÉ : LE MANQUE DE SOMMEIL

Sleep deprivation

« La recette miracle pour mieux vivre ? Dormez davantage ! » Telle était récemment la une du New York Times, un titre qui rappelle qu’en 2018, le manque chronique de sommeil était l’enjeu sanitaire numéro un.

Le manque de sommeil est la cause de très nombreux problèmes de santé. Le neurologue spécialiste du sommeil Matthew Walker affirme dans son best-seller Pourquoi nous dormons que « se contenter le plus souvent de moins de six ou sept heures de sommeil sabote votre système immunitaire et double le risque de cancer ».

Et c’est sans compter les risques accrus d’Alzheimer, de maladies cardiovasculaires et d’AVC ; la mémorisation est affectée ; une simple mauvaise nuit peut faire monter le taux de glycémie sanguin à des niveaux prédiabétiques.

Par le passé, seuls 2 % des Américains manquaient de sommeil : le tiers de la population est désormais concerné. C’est un risque bien réel pour les professionnels de la santé, mais aussi pour les forces armées et les conseils d’administration où les décideurs peuvent agir de façon erratique.

Le sommeil est donc un enjeu sanitaire et managérial. Proctor & Gamble et Goldman Sachs proposent des consultations en entreprise : il est temps de leur emboîter le pas.

LE SOMMEIL DES EMPLOYÉS NE DOIT PAS ÊTRE TRAITÉ À LA LÉGÈRE